Le Fer du Canigou, une manne pour le Vallespir

 

Le minerai de fer du Canigou est exploité depuis la protohistoire (-2200 avant JC), mais alors via une méthode très basique.

 

Quand la région devient une province romaine, les Romains exploitent également cette ressource, à partir du II éme siècle avant notre ère. Ils créent des forges sur les lieux de récolte du minerai. Le fer traité dans ces fours relativement simples, qui purifiaient le minerai, était utilisé pour divers matériels (armes, outils…). Lors des invasions barbares ces forges primaires sont détruites ou laissées à l’abandon.

 

Il faut attendre la reconquête du Vallespir par les Francs pour que peu à peu reprenne l’exploitation du minerai. Cependant les filons étant peu accessibles, souvent en haute montagne, l’activité est tributaire de l’accessibilité des terrains et des moyens de locomotion. A partir du XII éme siècle les voies de communication se développent et l’activité prend de l’ampleur, mais les techniques de productions, à la force de l’homme, ont peu progressé et reste rudimentaires.

 

L’essor de l’exploitation du minerai de fer se fait sous la couronne d’Aragon, à la faveur de lois instituant la liberté de recherches en sous-sol et la liberté d’exploiter tous les terrains (moyennant en retour 1/10ème des richesses exploitées au bénéfice du Roi). Les comptés de Catalogne nord, du Roussillon et de Cerdagne deviennent alors une des plus grandes ressources industrielles.

 

Nombre de villages des contreforts du massif du Canigou vont réouvrir les anciennes mines romaines et en créer de nouvelles. Sur le versant sud les mines sont notamment à Batère (1500m d’altitude) Corsavy en contre bas ou Prats de Mollo. Les forges pour transformer le minerai de fer du Canigou se multiplient, toutes sur la même architecture : on parle de forges catalanes.

Outre le feu via le charbon de bois, l’eau va alors jouer un rôle décisif tant pour le rôle de moteur qu’exerce la force hydraulique pour actionner les divers éléments de la forge (soufflet, martinet…) que pour son rôle d’agent chimique dans la réduction du minerai de fer. Les forges catalanes sont donc tout naturellement installées à proximité de torrents de montagne, comme le Ruiferrer par exemple à Arles sur Tech, littéralement la rivière du fer, et surtout le Tech dans la vallée, ils font office d’énergie motrice, pour ces forges nombreuses :

 

– Montferrer (‘mont du fer’)

– Arles sur Tech, 2 forges

– Le Tech

– Prats de Mollo

– Coustouges

– Serralongue

– Lamanère (‘la mine’), 2 forges

– Saint Laurent de Cerdans avec pas moins de 4 forges !

 

et jusque plus en aval à Reynes et même à Sorède presque au bord de la mer Méditerranée.

 

Les forges catalanes développées entre le Haut Moyen Âge et la fin du XIX éme siècle, connaissent leur apogée et leur maximum de production au XIX éme siècle. Paradoxalement juste avant leur déclin, notamment dû à la concurrence étrangère et aux innovations techniques des nouveaux moyens de transformation du minerai de fer tels que les hauts fourneaux (Ria, Prades, Fuilla).

 

Elles auront probablement participé par le charbonnage des forêts à la déforestation de certains versants de montagne, au même titre que le pâturage, qui seront victime de glissement de terrain lors de l’Aiguat de 1940.